Malgré ses vastes étendues et une population en forte croissance, l’Afrique peine à combler son retard en infrastructures routières. Le constat est implacable : 40 % des routes bitumées du continent sont concentrées entre l’Afrique du Sud et l’Algérie, laissant le reste du territoire dans une précarité logistique qui pèse lourdement sur son avenir économique. Décryptage !
Un continent déconnecté par manque d’infrastructures adaptées
Le contraste est pour le moins saisissant… Alors que l’Afrique occupe près de 20 % de la surface terrestre mondiale, son réseau routier bitumé ne représente qu’un maigre 1,5 % des routes asphaltées de la planète. Un chiffre qui résonne comme une anomalie économique, d’autant plus que le continent compte une population proche de celle de l’Inde, mais avec une superficie dix fois supérieure. Résultat, à peine 680 000 kilomètres de routes revêtues, contre un réseau indien six fois plus dense.
Dans cette géographie de la pénurie, l’Afrique du Sud et l’Algérie trustent à elles seules près de 40 % des infrastructures bitumées, reléguant les autres pays à des niveaux de desserte dignes du siècle dernier. En Afrique subsaharienne, on ne dénombre en moyenne que 2,3 kilomètres de routes revêtues pour 100 km², là où l’Inde affiche fièrement 138 kilomètres sur la même surface. Cette fracture routière n’est pas qu’une question de statistiques, elle est le symptôme d’un sous-investissement chronique et d’un entretien quasiment absent.
Un handicap économique majeur pour les échanges et la mobilité
Comme l’explique Yoann Gandzion, PDG d’Afrique Pesage et spécialiste des stations de péages permettant d’assurer la longévité des infrastructures routières, la route porte à bout de bras 80 % du transport de marchandises et 90 % de la mobilité des populations. En effet, sur le continent africain, le rail est quasiment à l’arrêt et les voies fluviales sous-exploitées. Cette dépendance absolue aux axes routiers accentue les inégalités régionales et alourdit le coût de la vie. Selon les données de l’Africa Finance Corporation, les dépenses liées au transport peuvent représenter jusqu’à 40 % du prix final des produits sur les marchés africains. Un surcoût qui pèse lourdement sur le pouvoir d’achat et freine la compétitivité des entreprises locales.
Comme l’explique es conséquences de cette carence sont multiples et bien connues : retards de livraison chroniques, insécurité accrue sur des routes dégradées, impact environnemental dramatique et, surtout, l’enclavement de vastes régions privées d’un accès décent aux services sociaux de base. À mesure que les camions s’embourbent et que les trajets s’éternisent, c’est toute une dynamique économique qui s’étouffe dans la poussière des pistes impraticables.
Vers un sursaut politique et financier ou un enlisement durable ?
La question n’est plus de savoir si l’Afrique a besoin de routes, mais quand elle décidera enfin d’en faire une priorité nationale et continentale. Le déficit est connu, les rapports s’accumulent, les chiffres sont sans appel, mais les politiques publiques peinent encore à enclencher un véritable tournant. Les investissements, lorsqu’ils existent, sont trop souvent concentrés sur quelques grands corridors au détriment des zones rurales, pourtant essentielles à l’équilibre des échanges et à la réduction des inégalités.